FMC : 10 points clésHypertrophie bénigne de la prostate

Une enquête étiologique rigoureuse est nécessaire avant d’attribuer une pollakiurie ou une polyurie à l’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP).

10/11/2022 Par Dr François Haab
  1. 01
    Point formation n°1

    Le vieillissement physiologique de la vessie se traduit par une surcharge en collagène et une raréfaction des fibres musculaires. Cette modification architecturale du détrusor se traduit cliniquement par une diminution de la contractilité vésicale et paradoxalement par une hyperactivité vésicale, avec augmentation de la fréquence des mictions. L’obstruction vésicale, quelle qu’en soit la cause, est un accélérateur du processus de vieillissement vésical. Ainsi, un obstacle mictionnel par HBP va provoquer une dégradation progressive et accélérée du détrusor.

  2. 02

    L’interrogatoire est essentiel, à la recherche de signes évocateurs d’obstruction patente : sensation de blocage lors de la miction, d’autant plus évocatrice si cette sensation est accentuée par une miction trop longtemps différée. Les signes irritatifs sont souvent au premier plan, associant pollakiurie diurne et nocturne et surtout urgenturies, parfois accompagnées de fuites.

  3. 03

    La fréquence mictionnelle nocturne est un motif fréquent de consultation. La gêne représentée par la fragmentation du sommeil est rapidement importante. Cependant, l’enquête étiologique doit être rigoureuse avant d’attribuer le symptôme à l’HBP. L’étape essentielle est de différencier pollakiurie et polyurie. Seul le calendrier mictionnel permet de répondre formellement à cette question. En cas de polyurie nocturne, la démarche diagnostique doit alors rechercher les principales causes : désordre métabolique, apnées du sommeil, apports liquidiens trop importants le soir…

  4. 04

    La survenue rapidement progressive d’une hyperactivité vésicale avec une absence de dysurie doit faire évoquer rapidement la possibilité d’une tumeur de vessie, a fortiori en cas de tabagisme chronique, même sevré. L’échographie, la cytologie urinaire et la cystoscopie sont rapidement indiquées.

  5. 05

    L’échographie est l’examen le plus rentable, car il permet d’apprécier la morphologie de la prostate (avec la recherche d’un lobe médian prostatique faisant saillie dans la vessie, qui constitue un facteur de risque de rétention) ainsi que le retentissement de l’obstacle en recherchant un épaississement anormal de la paroi de la vessie, un résidu post-mictionnel et, dans les cas extrêmes, une dilatation urétérale ou rénale.

  6. 06

    La proposition de traitement découle du bilan avec la réponse à trois questions :
    - l’HBP est-elle compliquée : rétention, infections, attente rénale ?
    - l’HBP est-elle à risque de complication : épaississement de la vessie, protrusion intravésicale, dysurie avec sensation de blocage ?
    - l’HBP est-elle responsable d’un retentissement sur la qualité de vie : urgenturies, incontinence ?
    Si la réponse à ces questions est négative (pour les 3), alors l’abstention thérapeutique est de mise, sous couvert d’une surveillance quel que soit le volume de la prostate.

  7. 07

    De nombreuses classes médicamenteuses sont disponibles : extraits de plantes, alphabloquants, inhibiteurs de la 5-alpha-réductase, inhibiteurs de phosphodiestérase, anticholinergiques, bêta-3-agonistes. Le choix du bon traitement pharmacologique est donc de plus en plus complexe et dépend de nombreux paramètres : comorbidités et interactions médicamenteuses, symptômes associés, notamment sexuels, volume de la prostate, parts respectives des signes irritatifs et obstructifs.

  8. 08
    Point formation n°8

    La chirurgie n’est pas discutable lorsque l’HBP est responsable de complications. Il convient également de prendre en compte le caractère évolutif de la maladie. Ainsi, il n’est pas logique d’attendre la survenue de la complication pour décider de la prise en charge. L’apparition de signes morphologiques qui témoigneraient de l’apparition de lésions du détrusor doit faire considérer l’option chirurgicale, ces lésions n’étant que très peu régressives, la désobstruction permettant en général une stabilisation.

  9. 09

    Le traitement chirurgical se divise en deux techniques : soit résection idéalement bipolaire au sérum physiologique ou plus rarement vaporisation de l’adénome, soit énucléation complète de l’adénome. Le choix dépend principalement du volume de la prostate, l’énucléation est en général retenue lorsque la glande dépasse 100 g. Les nouvelles techniques non chirurgicales d’embolisation ont une indication préférentielle pour les prostates de très gros volume, en particulier chez les patients sous anticoagulants ou encore lorsque l’indication principale est la survenue d’hématuries prostatiques sévères, notamment chez les patients sous anticoagulants.

  10. 10

    Les complications postopératoires sont finalement assez rares. Il est important de prévenir le patient que les effets du traitement peuvent prendre plusieurs semaines, le processus de cicatrisation interne pouvant nécessiter près de trois mois. À long terme, le risque d’incontinence est de l’ordre de 1 %, un peu supérieur en cas d’énucléation. Sur le plan sexuel, seul le risque d’éjaculation rétrograde est à prendre en compte, représentant entre 10 et 20 % des patients selon la technique utilisée.

Références :

- Rapport AFU 2018 : Hypertrophie bénigne de la prostate, progrès en urologie. Progrès en Urologie 2018;28(15):797-874.

Le Dr François Haab déclare n’avoir aucun lien d’intérêts concernant les données présentées dans cet article.

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